Basé à Amsterdam et dirigé par le duo de designers Golnar Roshan et Ruben de la Rive Box, Design & Practice est un studio de design spécialisé dans la valorisation de marques, la conception graphique et la direction artistique au service de clients des secteurs de la culture, de la création et de l’aménagement intérieur. Nous nous sommes entretenus avec eux au sujet de leur processus créatif – pour lequel ils puisent une grande partie de leur inspiration dans la pratique artistique qui est la leur au sein de leur studio d’art de Rive Roshan –, de la vision qu’ils ont de l’industrie créative et du travail qu’ils ont effectué sur la nouvelle identité visuelle du papier Olin.
Basé à Amsterdam et dirigé par le duo de designers Golnar Roshan et Ruben de la Rive Box, Design & Practice est un studio de design spécialisé dans la valorisation de marques, la conception graphique et la direction artistique au service de clients des secteurs de la culture, de la création et de l’aménagement intérieur. Nous nous sommes entretenus avec eux au sujet de leur processus créatif – pour lequel ils puisent une grande partie de leur inspiration dans la pratique artistique qui est la leur au sein de leur studio d’art de Rive Roshan –, de la vision qu’ils ont de l’industrie créative et du travail qu’ils ont effectué sur la nouvelle identité visuelle du papier Olin.
Golnar Roshan : Disons que nous sommes un studio spécialisé dans la création et que nous nous adressons à un public créatif, car une grande partie des travaux que nous réalisons est destinée aux créatifs eux-mêmes.
Ruben de la Rive Box : Nous venons tous deux d’horizons similaires : j’ai fait des études dans le domaine du design d’interaction, et Golnar a, lui, fait des études en communication visuelle ; et puis nous avons toujours travaillé au sein d’entreprises qui œuvraient dans le monde de la création. Même si le fait de travailler au service de l’industrie créative constitue encore une sorte de niche, cela revêt toutefois une dimension de plus en plus puissante dans la culture collective qui est la nôtre. Pour certaines des entreprises les plus importantes et les plus influentes du monde, la créativité constitue le moteur essentiel de la valeur qu’elles proposent. Du rôle relativement mineur qu’ils jouaient auparavant dans l’économie générale, les créatifs sont passés à celui de moteur de la culture et leur impact est désormais considérable.
RR : D’une certaine manière, on pourrait dire que l’ambition qui nous anime est tout entière contenue dans le nom que nous avons donné à notre studio. Nous sommes en effet particulièrement attachés à la nécessité de partir d’une perspective totalement ancrée dans le design avant de prêter ensuite toujours attention à la qualité de notre pratique.
GR : Le design que nous proposons, nous le concevons également en nous inscrivant dans la perspective de l’expérience et de l’immersion. Ce que nous voulons, c’est que les gens puissent s’identifier à une marque qui soit tout à la fois porteuse d’une sensibilité et d’une véritable personnalité. Lorsque nous avons travaillé sur l’identité du restaurant Le Drugstore, à Paris, nous avons nous-mêmes passé plusieurs mois en immersion dans l’ADN de ce lieu et nous nous sommes également attachés à le replacer dans son contexte historique, afin que l’identité de la marque puisse ainsi refléter la véritable « identité » du lieu lui-même, et qu’elle constitue en somme une extension naturelle de ses intérieurs, de sa cuisine et de son environnement.
Identité du restaurant Le Drugstore à Paris, par Design & Practice.
RR: La chose que nous trouvons vraiment amusante dans le fait de travailler avec d’autres créatifs, c’est que, même s’ils sont assez critiques et précis dans leurs exigences, ils font également preuve d’ouverture à l’égard des idées stimulantes. Le travail que nous avons effectué pour Tom Dixon en constitue ici une bonne illustration. Lorsque nous avons créé pour lui la boîte destinée à la présentation de matériaux, le véritable défi consistait à faire en sorte que cette boîte puisse être passionnante et qu’elle reflète également l’âme dont Tom est animé. Nous en sommes ainsi venus à imaginer une solution hybride, à mi-chemin entre une valise de voyage Louis Vuitton du milieu du siècle dernier et une solide boîte à outils pleine de cambouis directement sortie d’un atelier de réparation de vélos. Ce contraste que nous étions parvenus à déceler dans la personnalité et le caractère de Tom Dixon, il nous a alors semblé important qu’il puisse également se retrouver dans une boîte conçue en tant qu’outil de vente.
Boîte de présentation de matériaux pour Tom Dixon, par Design & Practice.
« (...) je crois que nous nous trouvons désormais dans une économie créative. »
RR : Je pense vraiment qu’un mouvement est engagé en ce sens. Après l’économie industrielle des années 70/80, nous sommes ensuite passés à une économie de services avant d’entrer, au cours des années 90, dans l’ère de l’économie de l’information. Or, aujourd’hui, maintenant que nous disposons de toutes ces informations, les questions se posent de savoir ce que nous pouvons faire de ces informations et d’identifier la manière dont nous pouvons les rendre compréhensibles et attrayantes pour les gens ; et cela exige de faire preuve de créativité. Alors, oui, je crois que nous nous trouvons désormais dans une économie créative.
GR : Cet aspect constitue en effet une part vraiment importante dans notre travail. Cela tient sans doute au fait que nous sommes des personnes assez intuitives et que nous nous aimons nous lancer dans des expérimentations avec les matériaux. Notre pratique repose sur la conviction profondément ancrée que c’est en permettant aux gens de vivre pleinement une expérience et de s’y connecter véritablement, qu’ils s’en souviendront et que cette expérience fera alors intrinsèquement partie de leur vie. Je pense, à cet égard, que la dimension tactile joue ici un rôle de tout premier plan. À vrai dire, quand on connaît la densité des ramifications nerveuses qui se trouvent au bout de nos doigts, et qui sont directement connectées à notre cerveau, cela semble assez inévitable. C’est donc tout naturellement que nous nous intéressons aux matériaux, aux connexions qu’ils créent en nous lorsque nous ouvrons quelque chose, aux types de sensations qu’ils procurent au toucher, aux sonorités qu’ils émettent. Nous croyons vraiment que le moyen le plus ultime de donner un sens à quelque chose est de parvenir à réunir l’ensemble de ces points et d’établir ces connexions.
« Et je pense, en définitive, que c’est en cela que consiste la créativité :
laisser son esprit vagabonder et s’accorder soi-même cette liberté (...). »
RR : Il faut dire à ce sujet que nous gérons deux studios distincts. Design & Practice est une agence axée sur le branding, c’est-à-dire la valorisation de marques, mais nous avons aussi Rive Roshan, qui est un studio d’art. Rive Roshan constitue notre véritable terrain de jeu. Nous y travaillons beaucoup avec le verre, le métal, le tissu et le bois, et, dans tous ces matériaux, nous essayons d’infuser de la couleur ainsi que ce que nous décrivons comme un émerveillement visuel. Le travail que nous effectuons au sein de ce studio exerce une influence directe ou indirecte sur la manière dont Design & Practice travaille à la construction d’images de marques.
GR : La fondation de Rive Roshan est venue de l’envie que nous avions de créer un travail qui nous soit propre et qui soit réalisé en toute liberté, sans avoir de brief de qui que ce soit, et en nous autorisant des explorations et des expérimentations qui ne soient pas limitées par quoi que ce soit. Et je pense, en définitive, que c’est en cela que consiste la créativité : laisser son esprit vagabonder et s’accorder soi-même cette liberté d’essayer quelque chose sans nullement ressentir l’effet de quelque pression ou jugement que ce soit venu(e) de l’extérieur. Au final, les éléments de réussite que peut connaître cette recherche sont ensuite susceptibles d’alimenter notre studio dédié à la valorisation de marques.
Exposition solo de Rive Roshan - « Shifting Perspectives » - au musée JAN Amstelveen.
Photographie d’Eddy Wenting.
RR : Nous sommes partis du constat que, de nos jours, la quasi-totalité des choix effectués dans le cadre du processus de projets d’impression de grande ampleur étaient le fait d’un designer ou du moins que ces choix étaient effectués sous la houlette d’un designer. Nous avons donc pris le parti de nous concentrer véritablement sur ce public et de faire ainsi en sorte qu’il ait envie de travailler avec le papier. Ce faisant, nous sommes parfaitement conscients du fait que nous visons un public doté d’un fort potentiel critique. Nous avons bien senti qu’il nous fallait, d’une part, créer quelque chose qui aurait un impact - et qui soit, par conséquent, porteur d’une certaine présence et d’une véritable expression -, et qu’il fallait, d’autre part, que nous proposions une solution tout à la fois très simple et très ouverte, afin que, à la minute même où les designers adoptent Olin, ils puissent immédiatement commencer à imaginer et à projeter leurs propres idées sur ce papier.
GR : À partir de là, nous avons décidé de jouer sur l’idée de la toile. Car le papier est bel et bien une toile, et sa nouvelle identité en est également devenue une. Nous avons pris le « O » d’Olin et nous en avons fait un cercle. Tout ce qui se produit au sein de ce cercle a pour effet de créer une plateforme créative véritablement globale pour tous ceux qui entrent en contact avec elle. C’est ainsi que le cercle est également devenu le cadre de tous les outils mis en œuvre. Cela s’applique également à l’art pouvant être amené à s’exprimer sur le papier, lequel peut aller de la typographie à la photographie, en passant par tout ce qui se trouve entre ces deux pôles.
RR : Le minimalisme chaleureux est un point sur lequel nous nous entretenons très souvent, car nous pensons que le minimalisme est une chose véritablement porteuse de sens et que son irruption dans notre culture a donné lieu à une grande liberté. Le seul point pouvant éventuellement poser problème, c’est que, parfois, nous avons l’impression que cela mène à des choses qui sont si rationnelles et tellement épurées que la sensibilité finit par leur faire entièrement défaut. Ce que nous appelons le minimalisme chaleureux consiste donc pour nous à éliminer tout ce qui est susceptible de faire désordre pour ne plus conserver que cette part essentielle, propre à provoquer la sensation d’une connexion émotionnelle.
GR : Bien entendu. De l’extérieur, le pack présente un aspect très minimal et très propre. Nous lui avons conféré une identité en noir et blanc, sans couleur, parce que nous voulions que le papier soit véritablement au centre de l’attention et qu’il soit ainsi possible de se concentrer pleinement sur la dimension tactile qu’il revêt. Mais lorsque le pack est ouvert, l’explosion d’idées et de matériaux est alors intense. La totalité de son contenu est le fruit d’un travail de collaboration effectué avec des imprimeurs ou avec notre studio d’art. Il s’est même inspiré de la réalisation physique de sculptures qui ont ensuite été photographiées puis converties en impressions, en s’appuyant sur des procédés spéciaux. En poursuivant dans la veine de cette idée de toile, nous voulions également que le contenu intérieur puisse varier.
RR : Nous avions auparavant déjà eu l’occasion de réaliser un livre pour Michael Adams, qui est un artiste basé aux Seychelles et qui produit des peintures ultra-colorées. Or cette expérience nous a appris énormément de choses. Cet artiste très charismatique réalise des sérigraphies de ses peintures en édition limitée. Pour traduire ses peintures en éléments imprimés, il a donc l’habitude de travailler avec des sérigraphes d’art extrêmement spécialisés. Or, lorsque nous avons réalisé pour lui ce livre que je viens d’évoquer, il estimait que ce que nous étions en train de faire était une reproduction de son œuvre. Et la façon dont il nous a alors expliqué l’importance du blanc a sans doute constitué l’une des conférences les plus inspirantes que j’ai eues dans ma vie au sujet de la signification que revêt la couleur. Le regard critique qu’il posait sur chaque détail et certainement quelque chose qui nous a accompagné pendant la totalité du projet.
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